Accueil » Nutrition » Science et nutrition » Le soja et la santé humaine
Riche en protéines, le soja est également une source importante de fer, de magnésium (particulièrement le tofu), de calcium (particulièrement les produits enrichis et le tofu préparé à partir de sulfate de calcium), de potassium, de vitamine B1, B9 et d’oméga-3.
Le soja est déclinable sous bien des formes, pratiques par exemple pour un bon apport protéique et pour remplacer les produits laitiers. Les boissons à base de soja sont désormais disponibles partout, certaines sont enrichies en calcium et adoucies avec du jus de fruits ou du sucre, d’autres sont aromatisées ou mélangées à des amandes, etc. Les yaourts au soja existent en beaucoup de parfums (différents fruits, amande, chocolat, café…), et la crème de soja est très utile en cuisine salée et sucrée.
Le tofu est très connu également, il en existe du ferme ou du soyeux (plus crémeux), fumé, avec des herbes, etc.
Les autres principaux aliments à base de soja sont certains simili-carnés (steaks de soja, saucisses de soja, etc.), les protéines de soja texturées, le tempeh, le miso et la sauce de soja.
Le soja est massivement consommé en Asie depuis des siècles et depuis plusieurs décennies de manière régulière en occident. Ainsi nous disposons de beaucoup de recul sur cet aliment qui présente soit pas davantage particulier soit un bénéfice pour la santé en fonction des situations (Onav, 2021).
Depuis les années 1990, le soja a été l’objet de très nombreuses recherches. Plus de 2 000 articles publiés chaque année dans des revues à comité de lecture font du soja l’un des aliments les plus étudiés (Messina, 2016)! Les recherches menées directement sur l’humain soutiennent la sûreté et les bénéfices de sa consommation : le soja convient à tous et à toutes.
Les isoflavones (parfois nommés phytoœstrogènes par abus de langage) contenues dans le soja ont des effets bénéfiques sur l’organisme dans le cadre d’une consommation régulière. Des études montrent que la consommation régulière de soja pourrait même réduire le risque de cancer de la prostate chez les hommes, et qu’elle n’est pas contre-indiquée par rapport au cancer du sein chez les femmes.
Les phyto-œstrogènes désignent une famille étendue de composés. Certains de ces composés sont présents dans des plantes parfois traditionnellement consommées en Occident : par exemple les fruits contiennent des lignanes, le soja, lui, contient des isoflavones. La réglisse, le houblon, la sauge figurent ainsi parmi les plantes à phyto-œstrogènes, qu’il y ait une activité démontrée ou non (Kuiper, 1998). Les isoflavones, quant à elles, désignent également une sous-famille de composés, dont deux sont retrouvés dans le soja : la daïdzéine et la génistéine.
Après avoir étudié les données disponibles, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (l’AFSSA, aujourd’hui appelée Anses) a établi en 2005 une recommandation à 1 mg/kg de poids corporel d’apport en isoflavones par jour maximum. Il s’agit en fait d’une limite de précaution, extrapolée à partir de recherches sur rongeurs. Quand on regarde l’équivalent en terme d’alimentation, cela correspond à une portion par jour. Il faut noter que la France est le seul pays à avoir une limitation concernant la consommation de soja (Onav, 2021).
Des données plus récentes de la littérature ont montré que ni le soja, ni les isoflavones ne pouvaient être classées comme perturbateur endocrinien, contrairement à ce que l’on peut lire (Messina, 2021). En France, la seconde stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens qui a débuté en 2019, n’a pas encore rendu ses conclusions sur le soja.
Produit | Isoflavones (génistèïne + daïdzéïne) mg / 100 g | Isoflavones (mg / g de protéines) |
Tofu | 24-28 | 3.3 |
“Lait” de soja (tonyu) | 7-8 | 2.2 |
Crème soja cuisine | 1-2 ( en mg / litre ) | non indiqué |
Miso de soja | 40-42 | 3.6 |
Tempeh | 42-44 | 2.4 |
Natto | 57-59 | 3.0 |
Sources : USDA & Adapté de AFSSA, 2005 et Messina et al., 2009
Le soja convient aussi aux enfants, aux femmes enceintes ou qui allaitent et aux bébés nourris au biberon, à condition de donner aux nourrissons du lait de soja maternisé (Bhatia et al., 2008 & Andres et al., 2015). La Société canadienne de pédiatrie (SCP) a établi dans un article sur les inquiétudes autour du soja dans l’alimentation des nourrissons que « l’expérience pratique révèle que les millions de nourrissons qui ont consommé ces produits [préparations pour nourrissons à base de soja] depuis les années 1960 semblent avoir grandi et atteint une maturité normale […], et ce, malgré toutes les théories qui pouvaient être formulées » (Société Canadienne de Pédiatrie, 2009).
L'Australie et le Canada recommandent même la consommation de soja dès la diversification alimentaire (Onav, 2021).
On lit parfois des arguments peu raisonnables qui ne sont pas appuyés par les études. Ainsi, parmi les accusations farfelues, on peut lire que le soja féminiserait les hommes. Cette rumeur prend racine dans des études sur cellules isolées et sur rongeurs, souvent exposés à des quantités d’isoflavones si grandes qu’il faudrait consommer plusieurs kilos de soja quotidiennement pour les atteindre via l’alimentation. Ces observations n’ont jamais trouvé écho chez les humains que ce soit à la croissance (Andres et al., 2015) ou à l’âge adulte (Messina, 2010), à l’exception de deux d’études de cas isolées où certains effets négatifs étaient apparus après la consommation quotidienne de plus de 10 portions de soja sur de longues périodes (Martinez et al., 2008 & Siepmann et al., 2011). Ces deux cas particuliers font exception puisque la plupart des hommes ne réagissent pas de manière négative à des quantités d’isoflavones bien supérieures (Fischer et al., 2004). De la même façon, aucun effet lié au soja n’a été démontré sur la qualité du sperme humain (Chavarro et al., 2008 & Beaton et al., 2010).
On trouve aussi des propos alarmistes sur la présence d’inhibiteurs de trypsine dans le soja (la trypsine est une des enzymes des sucs gastriques permettant la digestion). C’est ignorer qu’on sait depuis plus d’une trentaine d’années que les inhibiteurs de trypsine du soja semblent sans effet sur la trypsine humaine, qui est plus résistante que celle des autres animaux (Flavin, 1982). À notre connaissance, aucune étude n’est venue contredire ce résultat depuis. Pour couronner le tout, la cuisson détruit ces inhibiteurs, or, toutes les légumineuses, dont le soja, sont trempées et cuites avant consommation humaine !
Oui : puisque les études les plus récentes attestent qu’une consommation même régulière de soja n’a pas d’effet indésirable dans une alimentation équilibrée, il n’y a aucune raison rationnelle de s’en priver dans un cadre classique.
On peut bien sûr se passer de consommer du soja. Après tout, c’est une légumineuse et un oléagineux parmi d’autres, donc un simple aliment riche en protéines et en lipides.
Le soja cultivé en Amazonie sert à nourrir les animaux d’élevage, surtout les cochons et les poulets. L’élevage extensif et le soja exporté comme aliment du bétail sont ainsi la première cause de la déforestation au Brésil. Après une enquête de 3 ans publiée en juin 2009, Greenpeace affirme que l’élevage bovin est responsable à 63 % de la destruction de la forêt amazonienne.
Le premier vecteur de la déforestation amazonienne est le pâturage. Puis, les terres sont ensuite récupérées pour faire pousser du soja. Cependant celui-ci est importé uniquement pour la consommation des animaux d’élevage. Les personnes qui participent à la déforestation amazonienne liée au soja sont en réalité les personnes qui consomment de la viande (Onav, 2021).
En France, de nombreux produits (tofu, lait de soja…) sont fabriqués avec du soja cultivé en France, où l’essentiel des cultures se trouve dans le Sud-Ouest. Lorsque c’est le cas, c’est souvent indiqué sur l’emballage.
Messina, M., Mejia, S. B., Cassidy, A., Duncan, A., Kurzer, M., Nagato, C., Ronis, M., Rowland, I., Sievenpiper, J. & Barnes, S. (2021) Neither soyfoods nor isoflavones warrant classification as endocrine disruptors: a technical review of the observational and clinical data. Critical Reviews in Food Science and Nutrition, 1-57.
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